Grâce à ses éditeurs et au succès de ses livres, Paul-Émile Victor a toujours entretenu d'étroites relations avec les milieux littéraires en vogue, dont celui des surréalistes.
À la demande de son ami Jean Lescure, écrivain poète et membre fondateur du mouvement l'Oulipo (Ouvroir de Littérature Potentielle), Paul-Émile Victor accepte en 1960, non sans fierté, d'entrer au collège de Pataphysique. Inventée à la fin du xixe siècle par Alfred Jarry, la Pataphysique est "la science des solutions imaginaires" et "la science des exceptions".
Le Collège de 'Pataphysique, né en mai 1948, se définit donc comme une "société de recherches savantes et inutiles" qui part du principe que "toutes choses sont également belles, vraies, sérieuses", donc qu’elles peuvent légitimement être étudiées et traitées sérieusement.
La liste de ses (nombreuses) sous-commissions parle d'elle-même : sous-commission des Incompétences réalisatrices, des Hypothèses et Piédestaux, des Moralités sous-entendues…
On y trouve alors des hommes (et très très peu de femmes) venus de tous les horizons de l'art, de la culture et de l'esprit. Parmi eux, de grands noms comme le romancier Raymond Queneau, le peintre Max Ernst, le photographe Man Ray, mais aussi le poète Jacques Prévert, le cinéaste René Clair, ou encore le dramaturge Eugène Ionesco et l'écrivain Boris Vian, que le Collège de 'Pataphysique fut le premier à publier, l'un comme l'autre.
N'oublions pas de mentionner l'emblème pataphysique : l' "ombilic ubique" ou "gidouille", en référence au ventre du Père Ubu affublé d'une énorme spirale.
Paul-Émile Victor est intronisé « Transcendant Satrape » le 1er Ciclamen 87 de l'Ère pataphysique, c'est-à-dire le 23 mars 1960.
Comme ses confrères, il n'est soumis à aucune obligation sauf celle d'écrire un article quand il en a envie et sur un sujet qu'il peut traiter à la perfection.
Il a aussi l'obligation d'être lui-même, puisqu'il a été choisi pour ça… En effet, un Pataphysicien ne doit jamais se prendre au sérieux, mais il doit être d'une exigence totale dans ses écrits et ses publications.
Une citation doit toujours être mentionnée avec sa source, une expérience qui fonctionne doit toujours être testée. Le même souci d'exigence est évidemment requis pour le vocabulaire et la sémantique. »
Quant à Paul-Émile, il est surnommé par Raymond Queneau (« pourtant la gentillesse même » écrira-t-il) tantôt Polémil, tantôt Lipomel, tantôt Pélomil, ou encore Pilémol. Et là, ça passe moins bien… « Ce qui m'agaçait, m'irritait même, c'est sa consonance proche de “couille molle”, qui me vexait malgré moi. », avouera-t-il plus tard.